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Philippe Tailliez
Mémoire d’un mousquemer
dimanche 6 octobre 2002
L’aventure commence avant la Deuxième Guerre mondiale, en Méditerranée française. Philippe Tailliez et Jacques-Yves Cousteau, deux jeunes officiers de Marine, et Frédéric Dumas se rencontrent. lis prennent l’habitude de chasser le poisson dans l’archipel des Embiez. Voici formée l’équipe des « Mousquetaires de la mer », les « Mousquemers ».
Du Scaphandre autonome... aux Bathyscaphes
A la conquête des fonds marins
Curieusement, l’instinct ancestral du chasseur marque l’avènement de la conquête sous-marine moderne. En effet, pour améliorer leurs performances, les « Mousquemers » cherchent à imiter les poissons. Pour mieux voir, respirer plus longtemps sous l’eau, nager en toute liberté.
Sorte de branchies artificielles, le scaphandre autonome du commandant Yves Le Prieur existe déjà mais cet appareil respiratoire ne délivre pas de l’air automatiquement, à la demande du plongeur et à la pression ambiante.
Reconstitué pour les besoins du film, cet appareil respiratoire est utilisé par le lieutenant de
vaisseau Stéfani, de l’École de plongée de la Marine. Il livre ses impressions en sortant de l’eau.
Les « Mousquemers » l’ignorent encore : le régulateur de pression qui leur manque a été inventé un siècle auparavant. li faut une rencontre entre Jacques- Yves Cousteau et Emile Gagnan pour qu’il soit réinventé. L’ingénieur de l’Air Liquide a l’idée de miniaturiser le détendeur à gaz de ville qui équipe les véhicules sous l’Occupation. Après quelques essais, le branchement sur une bouteille d’air se révèle concluant.
Les « Mousquemers » évoluent enfin en toute liberté. Ils peuvent envisager un projet qui leur tient à cœur : un film sur les épaves.
Le succès de ce film et une plongée profonde de Frédéric Dumas, mettent en valeur les capacités du scaphandre autonome. La Marine charge Tailliez et Cousteau d’animer une commission d’études pour examiner les services qu’il pourrait rendre. En 1945, cette commission devient le Groupe de recherches sous-marines (G.R.S.). Philippe Tailliez en assure le premier commandement. Renforcée de volontaires, l’équipe se met au travail : neutralisation de champs de mines, expertises, recherche de victimes...
Le maître principal Jean-Paul Pinard évoque cette époque. Le G.R.S. installe dans l’arsenal ses bureaux, un atelier, un laboratoire de physiologie, équipe une vedette.
Coup terrible : la mort de Maurice Fargues lors d’un essai collectif de plongée profonde, en 1947. Des recherches s’engagent afin d’assurer la sécurité du plongeur. Et, déjà, pour poursuivre la conquête des fonds marins, on songe à des submersibles habitables qui protègeraient les passagers du froid et de la pression.
Ainsi commence la belle histoire des bathyscaphes à essence. Étranges navires des profondeurs inventés par le physicien Auguste Piccard, selon le principe du ballon stratosphérique.
Les ingénieurs de l’Armement Gempp et Willm décrivent l’engin, expliquent comment, après l’épisode dramatique du « FNRS 2 », à Dakar, la Marine a conduit la France aux premiers rangs de la conquête des abysses avec le « FNRS 3 » et l’ « Archimède ».
Les bathyscaphes ouvrent la voie à d’autres engins civils et militaires. Dans son intervention, Henri-Germain Delauze, président du Groupe Comex, préconise l’alliance entre la plongée humaine, les sous-marins et la robotique. Le commandant Plançon situe la plongée militaire.
De vastes chantiers marins
Plongée de loisir, archéologie, lutte contre la pollution, Archipelaego
Philippe Tailliez quitte la Marine en 1960. Il évoque sa dernière mission : le regroupement des écoles de plongée. Le jeune retraité n’abandonne pas pour autant la mer où le sollicitent de nouveaux champs d’activités.
Tout naturellement, il prend part à l’essor de la plongée de loisir : membre fondateur de la Fédération française d’études et de sports sous-marins puis de la Confédération mondiale des activités subaquatiques, il préside leur comité technique.
Philippe Tailliez s’investit pour la défense d’un patrimoine historique et naturel. Lui qui a dirigé les premières fouilles de l’archéologie sous-marine moderne, conduit de nombreux chantiers avec le concours de la Direction des recherches archéologiques sous-marines et de la Marine. Il préside, dès sa création, en 1982, le Groupe de recherche en archéologie navale.
Max Guérout, qui lui succède, raconte la fouille du « Slava Rossii », un navire de la Grande Catherine de Russie, naufragé en 1780.
Témoin de la dégradation des fonds marins, Philippe Tailliez est résolu à se battre au sein d’organismes scientifiques pour la sauvegarde de la mer. il est membre fondateur du Comité scientifique du parc national de Port-Cros, créé en 1964 ; de l’Institut océanographique Paul Ricard, aux Embiez, depuis la genèse en 1966 ; vice-président, à Toulon, d’une commission extra-municipale de sauvegarde des fonds marins (Ecomair).
Le Pr. Nardo Vicente. biologiste marin. décrit les campagnes « Poséidon » qui ont eu lieu au parc national de Port-Cros, avec le concours de la Marine Nationale. Les premiers inventaires des fonds marins sont réalisés, en particulier le suivi des prairies de Posidonies et des champs de nacres.
Depuis de nombreuses années, un vaste chantier, marin comme les précédents, occupe la pensée de Philippe Tailliez, mobilise ses forces, son imagination, sa mémoire. il s’agit du projet « Archipelaego ». « Un humanisme intégrant, à la fois, la mer et l’espace, écrit-il, un humanisme planétaire et qui ne peut être que pétri, quelles que soient les appartenances, d’énergie et de courage ».
Histoire du tournage et visionnage de la vidéo :
Philippe Tailliez - Mémoire d’un Mousquemer